mercredi 1 décembre 2010

Cinque (prononcez tchincoué)

Parce que tu parlais italien aussi. En plus du reste. Des mains, du regard, des silences. Dans chaque instant, des mots. Dans chaque interstice, des lettres. Il fallait parfois des semaines, des mois, des années pour reconstituer un message, parfois une fraction de seconde.

Il y avait un truc surtout, que je comprends mieux aujourd'hui : c'est d'avoir pris volontairement le parti de la frivolité. Peut-être parce que tu croyais en la vie et non en l'homme. De l'homme, peut-être, tu n'attendais rien.
Peut-être ne croyais-tu même pas à ce que tu avais mis en place : tu te montrais dynamique, conquérant et pourtant tu ne croyais ni à l'entreprise ni aux effets consolateurs de la réussite.
Tu tenais pour réel le froid de la tombe, déjà.
Tu tenais pour réels les manques, les absences, les folies, réel, le temps passé à transformer tout ça, réelle la pathétique machinerie de la vie.
Tu étais un homme sans illusion sur le passage du temps et tu avais le panache d'être authentiquement gai.
Un homme comme un autre croise des gens comme les autres, rien ne les distingue de l'humanité passée ou à venir. Et cela n'aurait aucune importance si tu n'avais pas été, ce que je tiens pour cent fois supérieur à l'homme heureux, un homme joyeux.